•  

    Les pages du livre ont l'odeur du passé.
    Ou peut-être elles en proviennent.


    Le livre sur le nez et les yeux fermés, j'ai l'impression d'être quinze ans en arrière, un soir au tout début du millénaire, sur le canapé en train d'essayer de lire le plus rapidement possible tous les livres que j'avais emprunté à la bibliothèque quelques heures plus tôt. Le ciel est noir, des grandes vitres du salon on voit les lumières des appartements parisiens de moyenne classe adjacents au notre. Mes parents sont partis faire des courses au supermarché d'en bas, je ne les ai pas accompagné afin de lire mes dernières trouvailles. Entourée de livres sur le canapé vert foncé aux motifs géométriques, je feuillette les images des bande-dessinées et passe un peu plus de temps sur les pages en papier glacé des albums de bricolage pour enfants. Les images me fascinent, alors je lis toujours tout en intégralité, comme si je manquais une information cruciale si je laissais échapper une ligne. Je lance mes boucles courtes en arrière pour ne pas qu'elles me dérangent. J'ai déjà lu la moitié de la dizaine de livres que j'ai emprunté cet après-midi. Est-ce que j'arriverai à tout finir dans la soirée ? Mon record est d'un soir et une matinée. Je tourne la page pour voir l'image suivante, il y a la suite des indications pour construire un igloo en polystyrène


    - Fiona !


    Je suis en 2016 sur mon lit entourée des livres empruntés il y a quelques heures à une bibliothèque parisienne qui doit tourner depuis au moins trente ans, mes cheveux longs étalés autour de moi, dans la maison en banlieue parisienne. De la fenêtre on ne voit pas grand-chose, les lumières sont éteintes dans l'allée d'en face. Le nez dans un livre plus vieux que moi, j'ai pour la première fois peut-être l'impression que quelque chose me manque dans ce passé que j'ai oublié comme on oublie chaque matin les rêves jusqu'à ce qu'une image ou une odeur nous les souvienne.



    3 juin 2016


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  • Simle

     

     

    Je suis repassée par cet endroit que j’avais oublié. Rien n’avait changé, mais il avait une couleur différente. L’herbe était d’un turquoise pâle, la lumière filtrait faiblement.
    Je suis passée à cet endroit pendant des années, si bien que ma perception des choses a été ajustée à sa couleur. J’ai perdu ce passage maintenant. J’ai fini ainsi par changer de référentiel.
    Mais en empruntant à nouveau ce passage, l’autre jour, un basculement s’est produit. J’ai commencé à voir tout ce qui était nouveau, tout ce que je ne connaissais pas à cette époque de ces couleurs anciennes. Rien n’a changé tout autour, mais les couleurs sont différentes. Elles sont familières. Elles ressemblent à un rêve que j’avais.
    Dans cette époque nouvelle je subis la vie ; Il n’a fallu qu’un passage pour le saisir, pour mettre les mots sur cette sensation qui me prenait depuis longtemps.
    Et au même passage les couleurs ont changé, faisant renaître subitement des souvenirs, réapparaître des écrits, des rêves diffus dilués dans la transparence du monde réel. Le passage appliquant sa perception dont s’échappe l’oublié.
    Tandis que le vent froid sème l’irréel.
    Je voudrais être proactive de cette vie brouillée oubliée aux couleurs familières.

      


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  • J'ai quitté une voie pavée droite lumineuse pour emprunter les chemins sinueux d'une forêt.
    Ces chemins étaient semblables, indistincts dans la forêt qui ne dévoilait pas la lumière de l'horizon. Pourtant, quelque chose était familier dans ces chemins, quelque chose qui me permettait de retrouver ce que j'avais perdu sous la lumière artificielle.
    Peut-être que j'aurais aimé y rester plus longtemps. J'aurais tant de choses à écrire sur les chemins sinueux.

    Puis un jour, je suis sortie de la forêt et j'ai atterri sur un lac.

    Il existe un lac que les gens cherchent à atteindre, pour être vus et reconnus. Une grande route les y amène, pour peu qu'ils réussissent à courir assez vite.

    Le lac est beau, le lac est grand, et debout sur la berge vous y êtes épiés.
    Alors j'ai commencé à m'enfoncer dans l'eau pour retrouver la solitude de la forêt.

    Je ne sais pas quand est-ce que cela a commencé,
    Ni comment exactement
    Mais je m'enfonce dans l'eau pour retrouver la solitude perdue

    Peut-être que j'aurais aimé
    Rester plus longtemps dans la forêt
    Peut-être
    Que j'aurais préféré les chemins sinueux au grand lac
    Où tout le monde vous regarde
    Se gaussant de vous voir
    Chuter

    Je ne sais plus quand cela a commencé, comment j'en suis arrivée à une telle situation qu'il faille prêter de l'attention aux murmures des gens
    Quand est-ce que j'ai commencé à m'enfoncer dans le lac pour être seule et oublier
    Pour retrouver les chemins sinueux qui ne s'exposent pas aux murmures du lac, qui protègent ce que la lumière artificielle détruit
    Les chemins que vous choisissez

    Je m'enfonce dans l'eau
    Pour les retrouver


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  • Par-delà la frontière

      

    La fin est proche.

    La frontière est à portée de vue, à quelques pas de l'horizon
    Et par-delà une tempête se dessine 

     

    J'ai traversé pendant des mois une ligne droite
    Prenant des détours, m'enfonçant dans des souterrains
    J'ai remonté à la surface un bref moment d'accalmie
    J'ai plongé dans les profondeurs de mon inconscient


    J'étais vide et j'ai à nouveau rempli mon esprit
    En ouvrant les yeux sur un autre plan
    Auquel j'appartenais sans m'en être jamais rendue compte


    Je m'approche de la ligne je ne vais tarder à la franchir
    Au prix d'une lutte qui s'abattra comme un éclair
    J'aperçois la plaine au-delà de la frontière
    Traversée par un ouragan


    Le ciel s'assombrit comme un orage, le crépuscule s'éteint.
    Pas d'étoiles en ce soir aucun or n'y tombe.
    Par-delà l'horizon quelque chose se meut quelque chose apparaît
    Par-delà la frontière quelque chose
    Se déchaîne

    La fin est proche

     

    Par-delà la frontière

    23 mai 2015

    Première photo
    Autoportrait


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